[RPG] The Last Mission...

Partir…

Annabelle avait plongeait son regard faible dans les yeux bleus de son amie. Elle sentait ses rares forces la quitter. Oui, il fallait partir… mais elle ne voulait pas.

Edward se redressa avec sa sœur soigneusement installée dans ses bras, puis regarda Emma avant d’hocher la tête.

Edward – « Emma a raison. Même si vous n’êtes surement pas les seuls blessés, les autorités vont forcément quadriller le périmètre. S’ils nous trouvent, ça risque de se corser. »

Annabelle fixait ses amis, l’air triste…
Edward fit un signe de tête à Alphonse. Il attrapa Ulrich et le souleva.

Alphonse – « Avec ta jambe, tu auras du mal à marcher. Je vais te porter. » Il se tourna vers Yumi. « Je ne pourrais pas me montrer devant les autorités, tu t’occuperas de lui ensuite ? »

La japonaise acquiesça. Odd fixait toujours Emma depuis qu’elle s’était levée, mais n’osait pas trop s’approcher, honteux d’avoir craqué plus tôt. Aelita posa sa main sur l’épaule de son ami et lui sourit faiblement, avant de le pousser vers Emma.

Aelita – « Allons-y, Odd. »

Le petit groupe de nouveau sur pied retourna discrètement vers le collège.

Annabelle ferma les yeux. Son cœur était serré, et son estomac noué. Elle l’avait senti un peu plus tôt, ce désagréable sentiment… comme si c’était la fin de tout.

Sur place, les gyrophares des pompiers tranchaient le reste de pénombre. Les élèves étaient dispersés, encore sous le choc. Certains criaient, d’autres pleuraient, parfois les deux. Quelques élèves étaient calmement rassemblés autour des véhicules rouges, tandis que d’autres aidaient à dégager les gravas en quête de survivant. Les professeurs n’échappaient pas à la situation…
Tous ces visages, plus ou moins connus de nos collégiens, étaient profondément marqué par ce qui venait d’arriver.

Le groupe s’arrêta à bonne distance. Tous contemplaient les dégâts avec une expression triste, dans le silence, incapable de dire un mot devant ce spectacle de désolation.

Alphonse posa Ulrich à terre, attirant l’attention. Yumi vint immédiatement le maintenir contre elle.

Alphonse – « C’est le moment de filer, Edward… »

Le temps sembla se figer sur cette phrase…

. . . . Partir ?

Edward tourna la tête lentement vers son jeune frère, pensif le fixant quelques secondes avant de regarder Annabelle.
Sa sœur le regarda, les yeux brillant. Elle ne voulait pas partir… non… pas loin d’eux. Il le savait, mais il n’y pouvait rien, il fallait y aller maintenant... Il ferma les yeux quelques instant, puis retourna son regard sur Alphonse, hochant la tête en signe d'approbation. Celui-ci s'avança donc vers les arbres, s'abritant des regards et attendant pour disparaitre.

Il fallait… tourner la page.

Les autres l’avaient compris aussi… n'est-ce pas ? Plus rien... plus rien ne serait jamais comme avant.
Annabelle les regarda tous. Tous ses amis… Elle sentit les larmes lui monter aux yeux.

-« Je… »

En une fraction de seconde, elle s’échappa des bras de son frère, et usa de ses dernières forces pour foncer sur ses amis, se jetant dans les bras d’Emma, la poussant contre Odd et Aelita.

-« Je déteste dire au revoir ! »

Cette simple phrase eu l’effet d’une bombe, prenant aux tripes chacun des collégiens, comme le cadenas d’une porte scellée qu’elle viendrait de faire sauter…

Les larmes se mirent à rouler sur ses joues. Penser qu’elle ne les verrait plus lui faisait tellement mal…

Tout ce qu’elle avait vécu avec eux depuis le début de l’année. Les cours, les repas, leurs aventures, tous ces moments de joie, avec eux tous…

Elle éclata en sanglot bruyamment, se réfugiant dans les bras d’Emma. Elle sentit son amie la serrer contre elle, suivit par la douce voix d’Aelita, qui rejoint l’étreinte, fondant en larmes elles aussi.
Les bras tremblant d’Odd enlacèrent les trois filles. Il cacha son visage dans les cheveux d’Annabelle, essayant d’étouffer ses sanglots.

Odd – « C-C’est malin ça… », Dit-il en riant sincèrement à travers ses larmes.
Yumi – « Idiote… », Murmura Yumi en souriant, aidant Ulrich à rejoindre le groupe.

Les larmes se remirent à rouler sur les joues de la japonaise, qui rejoint l’étreinte collective avec son bien-aimé.

Ulrich –« On aurait presque réussi à finir ça… dignement. »

Il étouffa un sanglot, lui aussi un sourire gêné greffer au visage au milieu de quelques larmes.
Annabelle pleurait de plus belle, serrée au milieu de tous.

-« Je vous aime les gens… tellement… ! »

Les larmes coulèrent librement sur les joues des collégiens. Annabelle releva les yeux vers eux, le visage rougit par les larmes. Ils avaient tous un sourire chaleureux sur les lèvres.

Ils fermèrent les yeux un instant, le visage de leur ami perdu se dessinant dans leur esprit. Il leur souriait, riant timidement comme il l’avait toujours fait.

« Adieu Jérémie... Merci pour tout. »

Leur faisant un geste de main, il se retourna pour faire quelques pas avant de disparaitre…

La main froide d’Edward se posa sur la tête d’Annabelle. Elle le regarda, il lui souriait chaleureusement aussi…

Edward – « On y va ? »

Elle regarda ses amis, se serrant une dernière fois contre eux.

-« Merci pour tout… »

Elle laissa Edward la reprendre dans ses bras, ne lâchant pas ses amis des yeux. Elle tendit son seul bras vers eux, encore retissant à l’idée de les laisser derrière elle.

Ses yeux s’écarquillèrent de surprise. La main gauche d’Emma vint saisir la sienne, suivit de la main gauche de chacun de collégiens. Elle put même sentir la main de Jérémie, et celle de Gaara, se poser une dernière fois sur les mains des collégiens.
Ils s’échangèrent tous le même regard. Un dernier au revoir, un dernier adieu… et pourtant… il semblait vouloir dire aussi « A la prochaine »

Annabelle fit un léger rire gêné, avant de regarder ses amis un à un, dans le moindre détail. Les gravant dans son esprit. Elle laissa sa main glisser hors du groupe, laissant ses frères l’entrainer au loin.
Elle les fixa jusqu’à ce qu’ils disparaissent tous entièrement de son champs de vision, secouant sa main pour leur dire au revoir, encore et encore…

C’est le moment…
Il est temps de … tourner la page.

Emma contempla d'un air absent tout le petit groupe se mettre en place, s'organiser pour le départ. Le temps pressait, les pas déterminés des autorités se faisaient de plus en plus proches.
Elle vit Aelita pousser doucement Odd vers elle. Trop perturbée, sans doute, pour comprendre qu'Odd se sentait ridicule d'avoir laissé ses larmes couler si librement plus tôt, et ne savait comment se faire pardonner d'avoir laissé tomber un masque de sûreté et de force psychologique qu'il avait gardé toutes ces années. L'avait-elle déçue...? Le regarderait-elle avec des yeux rassurants, emplis des sentiments qu'il avait toujours perçus si clairement ?
Mais le regard d'Emma restait vide, rivé sur le coeur de la forêt assombrie par l'air lourd de poussière.

Les collégiens se mirent en marche promptement, d'une marche rapide, prenant garde toutefois à ne pas faire de bruit en évitant les multiples branchages et feuilles jonchant le sol. Même le pas d'Alphonse semblait léger malgré sa lourde armure.
Doucement, silencieusement, le groupe d'amis progressait vers le collège. Chacun d'eux se demandait ce qui allait apparaître devant ses yeux lorsqu'ils l'auraient rejoint. Le complexe de bâtiments avait-il été touché ? Dans quelle mesure ? Y avait-il blessés...Morts...?

Lorsqu'elle fut en mesure de voir le collège, flou derrière l'air chargé, Emma fut emplie d'une sensation qu'elle détestait plus que tout. Cette étrange nausée, ce léger tournis, ces chatouilles désagréables dans ses tripes, la sensation qu'on lui a fait boire un liquide qui torture ses entrailles. L'émotion, l'envie de pleurer mais le besoin de retenir ses larmes, l'envie de crier mais la nécessité de garder le contrôle de soi au maximum. La sensation que le monde lui échappe. L'impression que l'étagère rangée de sa vie s'écroule sans préavis. Et que tout remettre en ordre lui est impossible.

La sensation que ce qu'elle chérit va s'en aller.

Le groupe s'approcha un peu plus du collège, à quelques mètres de l'orée de la forêt. Les couleurs criardes des gyrophares des autorités locales tranchaient dans la grisaille du tableau sinistre qu'était le collège.
Un des bâtiments s'était entièrement écroulé. Un autre penchait dangereusement, appuyé sur le bâtiment adjacent, comme alourdi par le poids des souvenirs. C'était le bâtiment de l'internat. Un peu partout, des personnes affolées, pleurant, criant, d'autres silencieuses mais graves, cherchaient des survivants, tentaient de se rendre utiles, ou cherchaient le peu d'effets personnels qu'il pouvait leur rester.

Des collégiens et des frères Elric, aucun ne prononçait mot sur le spectacle désolant.

Alphonse déposa doucement Ulrich à terre, assisté immédiatement par Yumi qui enlaça doucement et avec précaution son ami.
Edward serra un peu plus sa soeur contre lui.

Alphonse - "C'est le moment de filer, Edward..."

Ces mots résonnèrent quelques secondes dans la tête d'Emma. Ils restèrent suspendus quelques instants dans les airs, aussi figés que les collégiens dont les coeurs battaient fort.
Les frères Elric se consultèrent du regard. Puis leurs yeux se tournèrent vers leur jeune soeur.
Elle semblait si vulnérable ainsi lovée dans les bras d'Edward. Repliée sur elle-même, la tête légèrement baissée, elle leva doucement deux prunelles rouges vers son jeune frère.
Il perçut dans ses yeux une grande souffrance. Et un amour démesuré pour ses amis.

Mais il le fallait...
Il fallait partir...
Il fallait recommencer une nouvelle vie, loin des tumultes d'une vie de collégienne un peu trop remplie, de choses assez peu usuelles pour une adolescente de cet âge. De choses qui avaient causé tant de mal...

Ils avaient fait de leur mieux. Tous ensemble. Ils avaient tous combattu, reliés par une immuable amitié et une solidarité sans limite.
Tous, autour d'une même cause si importante, à combattre un ennemi si puissant...
Ce combat leur avait tant coûté... Il fallait passer à autre chose.

Chacun en avait conscience.
Mais chacun était pris aux tripes par une telle idée et ce qu'elle impliquait.

Alphonse froissa quelques feuilles de ses lourds pas, signalant à Edward qu'il était temps de partir.

Annabelle tourna légèrement la tête vers ses amis.
Ils s'étaient tous réunis. Tous devant elle. Tous étaient là, tout ce qu'ils représentaient... Etait là.
Sans réfléchir, prise par une émotion si soudaine, malgré son mal physique, elle se dégagea des bras d'Edward et vint se réfugier contre eux.

Emma sentit le corps lourd de son amie contre elle, les yeux fixés dans l'éternel.

Annabelle - "Je déteste dire au revoir !"

C'étaient les mots de trop.
Emma se pinça les lèvres. Sa vue se brouilla.
Droite, immobile, les yeux grands ouverts fixant le vide droit devant elle, elle luttait contre l'émotion.

Lorsqu'elle sentit la chaleur de ses compagnons autour d'elle, leurs bras l'enserrer, leurs larmes couler, ce fut trop.
Trop d'émotion.
Elle pleura comme jamais elle n'avait pleuré. Elle serra son amie contre elle comme le plus précieux des trésors.

Tous pleuraient. Plus rien n'importait.
Tout leur revenait en mémoire, cette aventure, ces moments partagés, ces rires, ces pleurs, l'internat, le collège, leur amitié...

Jérémie.

Tous sourirent doucement à son souvenir.

« Adieu Jérémie... Merci pour tout. »

Ils l'entendirent rire doucement et maladroitement...S'éloigner... Puis disparaître.

Annabelle releva son visage. Emma lui adressa son sourire le plus sincère.

Son frère la repris dans ses bras. Elle serra de sa main valide le col de son vêtement, ne lâchant pas des yeux ses amis, comme une enfant qui cherchait du réconfort après un dernier au revoir.

Puis elle tendit son bras vers eux, comme si elle voulait attraper leur souvenir pour l'emporter avec elle.
Emma vint saisir doucement la main qu'elle lui tendait, sans cesser de sourire.
Tous posèrent leur main sur celle de leur amie, signe d'une union éternelle.
Ce n'était qu'un au revoir, finalement...
Hein, ce n'est qu'un au revoir, dis...?

"Au revoir"...
Résonna "au revoir" dans sa tête d'enfant jusqu'à ce que son amie disparaisse...

Il résonna dans sa tête le rire d'une petite fille joyeuse qui disait "au revoir"...

~

Emma ne se souvint pas des adieux avec ses autres amis.
Sans doute celui avec Annabelle avait-il été le plus déchirant.
Leur avait-elle vraiment dit adieu...
Elle ne s'en souvint pas.

Quelle douce amnésie.

Lorsque la pluie irlandaise fouetta son visage, il lui semblait n'avoir jamais rien vécu de tout cela.

Sweet dream

Mokonaë World chapter 1 - END